Dans l’atelier de Janique Bourget, le papier respire, le feu se souvient, le verre se soumet à la lumière.
Elle y invente un langage où le vide devient promesse et où chaque trace est une renaissance.
Entre ombre et lumière, présence et absence, l’œuvre de Janique Bourget explore la matière comme on explore un langage intérieur. Artiste de la transformation, elle écoute le papier, le feu, le verre, dans une conversation intime où chaque élément révèle une mémoire enfouie. Son travail, à la croisée des métiers d’art et du design, interroge la fragilité et la trace, le souffle et le silence, jusqu’à faire naître du vide une forme de plénitude.
Installée dans son atelier au JAD – Jardin des métiers d’Art et du Design à Sèvres depuis plus de dix ans, Janique Bourget sculpte le mouvement, capte l’éphémère et en fait une matière sensible. Ses œuvres, à la fois aériennes et charnelles, célèbrent le vivant dans ce qu’il a de plus subtil : la vibration d’un creux, la mémoire d’une flamme, la douceur d’une disparition.
Poétique et sensorielle, sa démarche fait dialoguer les éléments et invite le spectateur à regarder autrement — non pas ce qui est là, mais ce qui demeure, invisible et essentiel.
Je suis heureuse de m’associer à l’univers de Janique Bourget à travers une œuvre magistrale imaginée pour Parella, où la sensibilité de l’artiste épouse la vision des espaces.
Pouvez-vous nous raconter votre parcours artistique et les étapes qui vous ont mené jusqu’à aujourd’hui ?
C’est l’appel de la matière et de leurs transformations qui a guidé mon approche, depuis mes formations en métiers d’art et en design jusqu’à la naissance de mes œuvres picturales et sculpturales actuelles.
Mon parcours est une longue conversation avec la matière née il y a plus de dix ans aux frontières des métiers d’art et du design.
Depuis 2012, mon atelier est l’épicentre de mes recherches, et l’exploration de la matière très présente dans mon approche. Ainsi je la mets en dialogue avec les éléments (air, feu et bientôt eau) que je mets en lien avec différents matériaux.
J’ai d’abord appris à écouter le papier, une matière rencontrée lors de mes études en 2012. Pendant des années, j’ai mené de longues recherches avec lui, en sculptant l’air dans ses creux jusqu’à révéler l’invisible dans le mouvement. D’une série de trames sont nées des sculptures muables, nées lentement et révélant des capacités inattendues de cette matière.
Puis est venu le temps du dialogue avec le feu aux côtés d’Alice Lebourg, où la combustion devenait acte créatif et où le verre capturait la mémoire du papier consumé.
Chaque élément m’a enseigné une nouvelle langue matérielle, faisant de mon atelier un laboratoire dans lequel la fragilité devient force et où chaque altération raconte une histoire.
Qu’est-ce qui vous a guidée vers le papier et le verre comme matériaux de prédilection ? Leurs apparentes fragilités ? Qu’y trouvez-vous que d’autres matières ne permettent pas ?
Quand le papier rencontre le verre dans nos créations avec Alice Lebourg, c’est tout un cycle du vivant qui s’exprime : la feuille se consume, le verre épouse sa dernière forme, et la mémoire de la transformation devient palpable.
Leur fragilité n’est pas une limite, mais une invitation à regarder avec tous ses sens – et à accueillir l’éphémère comme une forme de permanence.
Dans vos œuvres, le vide et le creux occupent une place centrale. Que souhaitez-vous exprimer à travers cette « présence de l’absence » ? Quelles émotions espérez-vous transmettre au spectateur ?
Pour moi le vide n’est pas un manque, mais une respiration.
Dans mes œuvres, les creux et les absences deviennent des réceptacles à sensations. Ils accueillent le regard comme on accueille un souffle, ce qui compte n’est pas ce qui manque, mais ce qui persiste dans l’invisible : la mémoire d’un mouvement, la trace d’un élément, la vibration de la lumière.
J’aime l’idée du paradoxe d’une présence de l’absence, c’est comme une vue “en négatif”.
Comme un silence entre deux notes de musique, le vide dans mes sculptures devient l’espace où le regard se pose et où l’imaginaire s’ancre. Il ne s’agit pas de montrer, mais de suggérer cela pour que chacun y dépose sa propre histoire.
Au fond, le creux n’est pas un oubli, mais un commencement.
Où puisez-vous vos inspirations au quotidien ? Y a-t-il des artistes ou des expériences qui nourrissent particulièrement votre démarche ?
Mes inspirations naissent souvent à la frontière du visible et de l’imaginaire.
Au quotidien, je me nourris de romans graphiques. De ces histoires où s’inventent des mondes sensibles, j’y puise une certaine grammaire du récit. J’aime me plonger dans les idées et les expressions graphiques d’autres artistes, observer les singularités de leurs histoires, tissées entre les mots et les images.
J’aime l’intimité que permet le livre, ce dialogue entre la main qui tourne les pages et l’esprit qui construit l’invisible – les bruits, les odeurs, l’émotion pure. Comme dans mon travail, il s’agit de révéler ce qui ne se montre pas d’emblée, mais qui se vit.
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